Vous connaissez surement le phénomène. La chimiophobie fait partie de notre société et se rencontre fréquemment dans le débat public. Mais est-elle un problème pour notre société ? Voici un question-réponse pour mieux connaître la chimiophobie.

 

Qu’est-ce que la chimiophobie ?

La chimiophobie est la peur des produits chimiques. C’est une peur qui peut infecter un individu, un groupe d’individus ou une société dans son ensemble. Une personne atteinte de chimiophobie va éviter les produits chimiques en général voir les rejeter. Une personne atteinte de chimiophobie peut ressentir une angoisse si elle doit manipuler un produit chimique ou s’il y a un produit chimique dans son environnement.

 

Y-a-t-il des produits générant plus de chimiophobie que d’autres ?

Oui, il y a deux éléments qui boostent fréquemment la chimiophobie. Ce sont les produits issus de la chimie de synthèse et les appellations complexes.

Ces dernières sont des produits auquel la science ou la législation a donné un nom complexe ou un code qui va générer la chimiophobie. Les produits issus de la chimie de synthèse génèrent plus de chimiophobie car ils sont dit « non-naturel » et peuvent être perçu comme « destructeur de l’environnement ».

A titre d’exemple, voici une liste d’appellations et de produits générant de la chimiophobie : pesticide, vaccin, numéro E, glyphosate et néonicotinoïdes.

 

Quel est la source de la chimiophobie ?

Il semble que la principale source de chimiophobie soit l’ignorance. Le manque d’information de bonne qualité et la diffusion à grande échelle d’information de mauvaise qualité créant et génèrent la méfiance nécessaire à la chimiophobie. En effet, il semble bien que ce soit la mal-information du grand public qui génère la chimiophobie au niveau de l’individu, des groupes d’individu et de la société.

Un exemple bien connu est le canular du monoxyde de dihydrogène. En effet, sous son nom moléculaire et en présentant des faits scientifiques aux conséquences néfastes, il est possible de générer un soutien populaire pour l’interdiction de l’eau.

 

Y-a-t-il un aspect positif à la chimiophobie ?

Il n’y a pas d’aspect positif à l’ignorance et à la mal-information. C’est pourquoi, il est peu probable que la chimiophobie ait un impact positif sur la société. Malheureusement, l’intérêt personnel n’est pas négligeable et il semble que certaines personnes trouvent un intérêt personnel à maintenir ou à aggraver le phénomène.

 

Quel est l’impact de la chimiophobie sur la société, la santé et l’environnement ?

Le phénomène est très présent dans le débat public et dans la société. La chimiophobie a poussé certains parents à ne pas vacciner leurs enfants. Par conséquent, la protection de la société dans son ensemble est réduite et les cas de certaines maladies infantiles sont en augmentation. Ce phénomène impacte aussi la protection de l’environnement en focalisant l’attention du public sur les produits chimiques. Malheureusement les écosystèmes sont complexes et le simple fait de retirer un produit ne résout pas les problèmes et, parfois, peut les empirer.

Par exemple, le glyphosate est un formidable outil en agriculture pour limiter l’érosion des sols et préserver la qualité des eaux. L’interdire risque de nuire à l’environnement. La chimiophobie a aussi endommagé les liens entre la filière agroalimentaire et le consommateur. En effet, ce phénomène a poussé des consommateurs à changer leurs habitudes et à acheter des produits différents malgré que la science ne puisse trouver un gain pour la santé ou pour l’environnement.

 

Y-a-t-il un cercle vicieux de la chimiophobie ? Le phénomène s’auto-entretient-il ?

Oui, le phénomène peut s’auto-entretenir car l’angoisse peut orienter le travail d’investigation. En effet, lorsqu’il y a un problème, la question à se poser est : « quel est l’origine du problème ? ». Mais sous l’influence de la chimiophobie la question peut devenir : « Ce produit est-il à l’origine du problème ? ». Par exemple, si la population des abeilles diminue fortement, la bonne question est « quel est l’origine de la chute de la population d’abeilles ? » alors que sous l’influence de chimiophobie la question devient « Ce produit tue-t-il des abeilles ? ».

La chimiophobie a un impact non-négligeable sur la société. Elle déplace le centre d’attention du grand public sur un groupe de produits et de pratiques limitant ainsi l’attention disponible pour des sujets plus importants. De plus, la chimiophobie exacerbée peut générer des problèmes de santé publiques et des dégâts environnementaux. De par notre passé commun, nous savons qu’une phobie généralisée n’est pas signe de progrès pour la société.

Il est important de savoir quand réagir. Ma question à vous : faut-il agir aujourd’hui pour réduire la chimiophobie ?

 


Tribune rédigée par notre contributeur externe Thierry Stokkermans,  ingénieur généraliste qui s'est spécialisé dans le sol, l'agriculture et les interactions entre l'agriculture et le sol. Après plusieurs années en Nouvelle Zélande, il habite aujourd'hui à Wageningen aux Pays Bas.

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